Zoom sur... la variation de la hauteur de chute
La hauteur de chute est la différence entre le niveau d'eau amont et le niveau d'eau aval. Elle est exprimée en mètres et les niveaux d'eau qui correspondent à l'altitude de la surface de l'eau sont exprimés en France dans le repère NGF (nivellement général de la France).
Remarque : on parle aussi de hauteur de chute brute pour la distinguer de la hauteur de chute nette qui prend en compte les pertes de charges (pertes d'énergie) dans les ouvrages. Dans cet article, il n'est question que de la hauteur de chute brute, appelée tout simplement hauteur de chute par souci de simplicité.
Les niveaux d'eau amont et aval varient en fonction du débit de la rivière mais pas de la même manière. Le niveau amont d'une centrale peut être régulé par le barrage et le vannage qui créent la retenue. Alors que le niveau d'eau à l'aval de la centrale ne dépend que de la géométrie du cours d'eau en aval.
Enjeux
La détermination de la variation des niveaux d'eau est particulièrement importante pour les centrales de basse chute. En effet, pour une centrale de 2 m de chute, une baisse de quelques dizaines de centimètres aura des conséquences sur la production alors que cela sera négligeable pour une centrale de plus de 10 m de chute.
Les remontées aval, c'est-à-dire la hausse du niveau aval avec l'augmentation du débit de la rivière, rendent particulièrement difficile le développement des projets de basse chute. Bien souvent en effet, le niveau d'eau aval monte plus vite que le niveau d'eau amont ce qui entraîne une baisse de la hauteur de chute. C'est pourquoi il faut être très prudent lorsque l'on parle de hauteur de chute car on mentionne souvent une hauteur de chute à l'étiage, c'est-à-dire que l'on parle d'une hauteur de chute maximale qui a lieu aux basses eaux. Par exemple, si un ouvrage a 2,5 m de chute à l'étiage, il n'en a peut être plus que 1,8 m lorsque la centrale tourne à pleine puissance. La connaissance de la variation des niveaux d'eau est primordiale pour calculer le productible.
De manière générale, le dimensionnement des ouvrages de prise d'eau et de restitution nécessitent également de connaître les niveaux d'eau minimum et maximum (sans parler des niveaux de crue). La hauteur de chute maximale à l'étiage est par ailleurs un paramètre dimensionnant pour la passe à poissons de montaison et de dévalaison.
Niveau amont
La variation du niveau amont est plus facile à déterminer que la variation du niveau aval. Généralement le barrage existant ou le droit d'eau fixe la limite basse du plan d'eau amont qui constitue le niveau légal de retenue. Pour le bon fonctionnement de la centrale et des passes à poissons de montaison et de dévalaison, le niveau amont ne doit pas baisser sous le niveau légal de retenue.
Il peut en revanche être plus élevé, cela dépend de la régulation souhaitée. Sur certains sites, le niveau amont va monter avec l'augmentation du débit de la rivière, comme c'est le cas naturellement et cela se traduit en pratique souvent par une surverse au-dessus d'un seuil fixe. Sur d'autres sites, les contraintes liées à la navigation ou encore à des centrales hydroélectriques en amont, obligeront à maintenir un niveau de retenue constant ou à limiter l'augmentation du niveau d'eau amont. Dans ce cas, pour éviter que le niveau d'eau amont n'augmente, le débit sera évacué par l'ouverture de vannes ou de clapets.
La variation du niveau d'eau amont est donc plus facilement connue puisque choisie (sous contraintes) pour le projet hydroélectrique.
Niveau aval
Au contraire, la centrale hydroélectrique n'influe pas sur le niveau aval. Celui-ci est intrinsèque au cours d'eau à cet endroit et sa variation dépend uniquement du débit dans la rivière. Sauf s'il se trouvait influencé par une retenue d'un barrage directement en aval, mais ce n'est pas l'objet de cet article. La variation du niveau d'eau aval en fonction du débit n'est pas connue a priori sans relevés ou calculs. Elle dépend en effet de la géométrie du cours d'eau en aval et est donc spécifique à chaque endroit. Il existe alors plusieurs méthodes pour estimer cette variation.
La meilleure méthode est d'effectuer des relevés sur site à différents débits avec suffisamment de relevés pour pouvoir tracer une courbe. Cela prend donc souvent plusieurs mois pour balayer une plage de débits suffisamment large. Une sonde de mesure peut être installée pour automatiser les relevés et la récupération des données. A chaque relevé de niveau aval doit être associé un débit de la rivière. Le débit correspondant est généralement estimé d'après les relevés de débit de la station hydrologique la plus proche.
Une autre méthode consiste en une simulation numérique de l'écoulement à l'aval. L'écoulement est simulé à partir de plusieurs profils de la rivière issus d'un relevé géométrique et d'hypothèses de rugosité. Le logiciel Hec-Ras fournit par exemple un bon outil pour une modélisation hydraulique de l'écoulement. Le niveau aval est ainsi simulé pour différents débits.
Enfin pour une phase très en amont du projet, lorsqu'aucun relevé n'a encore pu être effectué, la variation du niveau aval est estimée par expérience et analogie avec d'autres sites. Cette estimation sommaire est à considérer avec prudence et doit autant que possible être affinée par une des deux méthodes citées précédemment.